PROGRAMMATION AVRIL 2011
USA, 1971, 1h40, VF
avec Gene Wilder, Jack Albertson, Peter Ostrum
avec Gene Wilder, Jack Albertson, Peter Ostrum
Charlie, enfant issu d’une famille pauvre, travaille pour subvenir aux besoins des siens. Il doit économiser chaque penny , et ne peut s’offrir les friandises dont raffolent les enfants de son âge. Alors comment participer au concours organisé par l’inquiétant Willy Wonka, le légendaire propriétaire de la fabrique de chocolat de la ville. Celui qui découvrira l’un des cinq tickets d’or que Wonka a caché dans ses barres de chocolat gagnera une vie de sucreries.
« Il n’aura pas fallu dix ans à Roald Dahl, coqueluche de la littérature enfantine de l’après-guerre, pour voir son plus grand succès, Charlie et la chocolaterie, adapté au cinéma − une adaptation qu’il désavouera d’ailleurs totalement. Avec son casting hétéroclite, ce "premier Charlie" ne parle pas tant d’un homme qui refuse de grandir que d’un petit garçon qui refuse, malgré les assauts répétés de la réalité pour le forcer à faire le contraire, d’abandonner ses rêves.
Difficile d’échapper à Tim Burton, lorsqu’il s’agit de chroniquer "l’original" d’un des derniers films du réalisateur d’Ed Wood. Pourtant, combien le film de Mel Stuart est éloigné de celui de Burton ! Le canevas est similaire : Charlie Bucket, gentil petit garçon pauvre, ne rêve, secrètement, que de visiter la mystérieuse usine de Willy Wonka, maître en chocolaterie. Lorsque le hasard le mettra en présence de l’un des cinq « tickets d’or » donnant accès à la très secrète bâtisse, Charlie voit ses rêves se réaliser.
Cela tient-il à l’époque ? Les préoccupations de Mel Stuart, qui quelques années plus tard réalisera le fabuleux Wattstax, sur le « Woodstock Soul », ne sont pas vraiment celle de Burton. Sans doute parce que, pour toutes ses fautes, le film de Burton demeure certainement la tentative la plus sincère du réalisateur pour revenir à son univers personnel, par le truchement de son alter-ego Johnny Depp, de ces dernières années − là où Mel Stuart ne s’exprime pas du tout dans son interprète, Gene Wilder.
Celui-ci possède le personnage de Willy Wonka avec une grâce étonnante, apportant sa fragilité ironique au personnage, mais également sa propension au non-sens (il n’aura accepté le rôle très convoité − notamment par l’intégralité des Monty Python − qu’à la seule condition qu’on lui laisse faire une roulade à sa première apparition). Ce Willy Wonka est un homme très assuré, à la fois un artisan passionné, un dandy suffisant... et un homme à l’humour d’une terrible noirceur.
Parfaitement à l’aise dans son show, Wonka va donc tromper, jouer, humilier ceux de ses jeunes visiteurs dont il n’apprécie pas la nature profonde, et leurs parents avec eux. Tout est préparé pour qu’un enfant, et un seul, "triomphe" des épreuves de Wonka, toutes les visites de salles semblant explicitement mise en place pour refouler les insupportables petits concurrents. Au scénariste David Seltzer, on doit l’attirail invraisemblable de citations vachardes qui émaillent le discours d’un Willy Wonka placide et mesquin : « Le suspense est terrible. J’espère qu’il va durer », lance t-il ainsi alors qu’un de ses jeunes visiteurs souffre un martyr potentiellement fatal, citant ici Wilde. Gene Wilder procure donc cet étrange mélange de candeur et de menace, qui fera merveille quelques années plus tard dans sa composition du Dr. Frankenstein (Frankenstein Jr ; David Seltzer rédige une partition langagière en forme de feu d’artifice cassant qui ne transcende son aspect agressif et mesquin que par la composition de Wilder.
Roald Dahl, à l’origine du scénario, ne se retrouvera jamais réellement dans ce Willy Wonka − il désavouera même totalement le film. Cela tient-il au traitement imposé par Seltzer et Stuart ? Toujours est-il que ce Charlie est un conte ancré dans une réalité bien précise : celle d’une misère matérielle et sociale dont le traitement est presque politique. Charlie et la chocolaterie est, certes, une comédie musicale, et un film profondément fantaisiste, prenant la visite de ladite usine comme point d’orgue. Mais la visite de l’usine, de même que l’apparition de Willy Wonka n’apparaissent que dans une seconde partie du film. Quant à l’aspect musical du film, la partition jouée par les Oompa-Loompas le place bien loin des traditionnelles production du genre.
La première partie du film se veut donc être une série de caricatures, instantanés croquant à gros traits des caractères sociaux typiques, mais qui présentent la particularité d’avoir été dessinés en amont des sujets de critiques (contrairement au film de Burton, qui apparaît de ce point de vue comme presque redondant). Autant le film de Stuart que le livre de Roald Dahl donnent ainsi cette impression de prévoyance sur les tares d’une société, tares qui nous sont devenues très familières. Ces caricatures sont autant de saynètes, pourtant passablement homogènes dans le déroulement du récit, qui placent presque plus volontiers Charlie et la chocolaterie dans la catégorie des films à thèse politique, que dans celle, plus inoffensive, des comédies musicales pour enfants − une classification que ne désavouerait certainement pas le réalisateur de Wattstax.
Alors, ce Charlie serait-il un brûlot politique, un monument de subversion ? N’allons pas jusque-là. Cependant, à la fois la composition de Gene Wilder et la mise en scène de Mel Stuart jettent sur ce film apparemment simple et "enfantin" une ombre aussi subtile que le fait la prose de Roald Dahl dans son livre. Film singulier, ce Charlie tient donc autant du film enfantin que d’une douce subversion, exemple devenu beaucoup plus rare aujourd’hui d’un film jouant sur ses niveaux de lectures, même dans les terres pourtant formatées du cinéma pour les plus petits. »
Vincent Avenel, www.critikat.com
« Il n’aura pas fallu dix ans à Roald Dahl, coqueluche de la littérature enfantine de l’après-guerre, pour voir son plus grand succès, Charlie et la chocolaterie, adapté au cinéma − une adaptation qu’il désavouera d’ailleurs totalement. Avec son casting hétéroclite, ce "premier Charlie" ne parle pas tant d’un homme qui refuse de grandir que d’un petit garçon qui refuse, malgré les assauts répétés de la réalité pour le forcer à faire le contraire, d’abandonner ses rêves.
Difficile d’échapper à Tim Burton, lorsqu’il s’agit de chroniquer "l’original" d’un des derniers films du réalisateur d’Ed Wood. Pourtant, combien le film de Mel Stuart est éloigné de celui de Burton ! Le canevas est similaire : Charlie Bucket, gentil petit garçon pauvre, ne rêve, secrètement, que de visiter la mystérieuse usine de Willy Wonka, maître en chocolaterie. Lorsque le hasard le mettra en présence de l’un des cinq « tickets d’or » donnant accès à la très secrète bâtisse, Charlie voit ses rêves se réaliser.
Cela tient-il à l’époque ? Les préoccupations de Mel Stuart, qui quelques années plus tard réalisera le fabuleux Wattstax, sur le « Woodstock Soul », ne sont pas vraiment celle de Burton. Sans doute parce que, pour toutes ses fautes, le film de Burton demeure certainement la tentative la plus sincère du réalisateur pour revenir à son univers personnel, par le truchement de son alter-ego Johnny Depp, de ces dernières années − là où Mel Stuart ne s’exprime pas du tout dans son interprète, Gene Wilder.
Celui-ci possède le personnage de Willy Wonka avec une grâce étonnante, apportant sa fragilité ironique au personnage, mais également sa propension au non-sens (il n’aura accepté le rôle très convoité − notamment par l’intégralité des Monty Python − qu’à la seule condition qu’on lui laisse faire une roulade à sa première apparition). Ce Willy Wonka est un homme très assuré, à la fois un artisan passionné, un dandy suffisant... et un homme à l’humour d’une terrible noirceur.
Parfaitement à l’aise dans son show, Wonka va donc tromper, jouer, humilier ceux de ses jeunes visiteurs dont il n’apprécie pas la nature profonde, et leurs parents avec eux. Tout est préparé pour qu’un enfant, et un seul, "triomphe" des épreuves de Wonka, toutes les visites de salles semblant explicitement mise en place pour refouler les insupportables petits concurrents. Au scénariste David Seltzer, on doit l’attirail invraisemblable de citations vachardes qui émaillent le discours d’un Willy Wonka placide et mesquin : « Le suspense est terrible. J’espère qu’il va durer », lance t-il ainsi alors qu’un de ses jeunes visiteurs souffre un martyr potentiellement fatal, citant ici Wilde. Gene Wilder procure donc cet étrange mélange de candeur et de menace, qui fera merveille quelques années plus tard dans sa composition du Dr. Frankenstein (Frankenstein Jr ; David Seltzer rédige une partition langagière en forme de feu d’artifice cassant qui ne transcende son aspect agressif et mesquin que par la composition de Wilder.
Roald Dahl, à l’origine du scénario, ne se retrouvera jamais réellement dans ce Willy Wonka − il désavouera même totalement le film. Cela tient-il au traitement imposé par Seltzer et Stuart ? Toujours est-il que ce Charlie est un conte ancré dans une réalité bien précise : celle d’une misère matérielle et sociale dont le traitement est presque politique. Charlie et la chocolaterie est, certes, une comédie musicale, et un film profondément fantaisiste, prenant la visite de ladite usine comme point d’orgue. Mais la visite de l’usine, de même que l’apparition de Willy Wonka n’apparaissent que dans une seconde partie du film. Quant à l’aspect musical du film, la partition jouée par les Oompa-Loompas le place bien loin des traditionnelles production du genre.
La première partie du film se veut donc être une série de caricatures, instantanés croquant à gros traits des caractères sociaux typiques, mais qui présentent la particularité d’avoir été dessinés en amont des sujets de critiques (contrairement au film de Burton, qui apparaît de ce point de vue comme presque redondant). Autant le film de Stuart que le livre de Roald Dahl donnent ainsi cette impression de prévoyance sur les tares d’une société, tares qui nous sont devenues très familières. Ces caricatures sont autant de saynètes, pourtant passablement homogènes dans le déroulement du récit, qui placent presque plus volontiers Charlie et la chocolaterie dans la catégorie des films à thèse politique, que dans celle, plus inoffensive, des comédies musicales pour enfants − une classification que ne désavouerait certainement pas le réalisateur de Wattstax.
Alors, ce Charlie serait-il un brûlot politique, un monument de subversion ? N’allons pas jusque-là. Cependant, à la fois la composition de Gene Wilder et la mise en scène de Mel Stuart jettent sur ce film apparemment simple et "enfantin" une ombre aussi subtile que le fait la prose de Roald Dahl dans son livre. Film singulier, ce Charlie tient donc autant du film enfantin que d’une douce subversion, exemple devenu beaucoup plus rare aujourd’hui d’un film jouant sur ses niveaux de lectures, même dans les terres pourtant formatées du cinéma pour les plus petits. »
Vincent Avenel, www.critikat.com
Séances
mercredi 6 avril à 14h30
samedi 9 avril à 17h
dimanche 10 avril à 17h15
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