CYCLES ET RÉTROSPECTIVES

Close-up (Nemaye Nazdik)


de Abbas Kiarostami



CINÉMA D'HIER ET AUJOURD'HUI • JUIN 2016

Iran, 1991, 1h34, VOSTF
avec Hossein Sabzian, Hassan Farazmand, Abolfazl Ahankhah
VERSION RESTAURÉE

Le film naît d'un fait divers : un homme (Sabzian) usurpe l'identité d'un célèbre réalisateur (Mohsen Makhmalbaf) et dupe toute une famille bourgeoise de Téhéran en lui assurant que ses membres et sa demeure seront le sujet et le décor de son prochain film. L'homme sera démasqué puis arrêté. A partir de cette incursion de la fiction dans le réel, Abbas Kiarostami explore les rapports qu'il existe entre fiction et documentaire et à quel point les deux sont autant source de vérité. Le film joue avec les incertitudes provoquées par le statut ambigu des images. Vérité et mensonge deviennent des valeurs mouvantes, interchangeables et toutes relatives. Le film devient un objet hybride que le spectateur ne peut plus se contenter de regarder en faisant une distinction facile et nette entre le domaine de l'imagination et celui du réel documenté, les deux étant les versants d'une même réalité.

"Close-up d’Abbas Kiarostami (1990) a été reconnu dès sa venue au monde comme un chef-d’œuvre de “film sur le cinéma”. Il déchiffre à son tour une figure d’escroc. Il nous parle de notre confiance dans le cinéma et de son double exact, notre méfiance envers le monde.
Close-up raconte l’histoire vraie d’un mensonge : un homme, Sabzian, se fait passer pour le célèbre cinéaste iranien Mohsen Makhmalbaf auprès d’une famille de Téhéran à qui il propose de tourner un film. Démasqué, il est arrêté et jugé. D’une part, le film décrit l’arrestation et le procès de Sabzian, les raisons par lesquelles il explique ses actes.D’autre part, Close-up rejoue l’affaire, en reconstitue les étapes avec les personnes qui l’ont vécue et qui jouent leur propre rôle.
L’amour du cinéma, son importance dans la vie du cinéaste sans œuvre Sabzian et dans celle de la famille Ahankhah, aussi bien que la faculté du cinéma à ne faire qu’un avec la vie (celle de ses spectateurs, celle de ses auteurs, à l’endroit énigmatique où à leur tour ils ne font qu’un), sont ici mis en procès. Mais pas pour interroger la supposée frontière entre vérité et mensonge, entre fiction et documentaire, entre vie et art.
Ces distinctions sont évacuées d’entrée de jeu, peut-être dans le geste du chauffeur de taxi, coup de pied lancé dans une bombe aérosol vide dévalant la rue en pente. Non, Close-up prend entièrement le parti de Sabzian, le parti de la fiction : rien que le cinéma. La fin du film, emportant sur une même moto le faux et le vrai Makhmalbaf, où ce dernier s’avoue “fatigué” d’être lui-même, se donne comme un pur transport. Le bus où Sabzian rencontre Mme Ahankhah, le taxi qui sert à son arrestation, la moto qui le réconcilie avec son rôle, comme le bateau de Melville, sont les véhicules d’une vraie sortie. Si elle nous émeut aux larmes, ce n’est pas parce qu’elle nous redonne confiance dans le monde, mais parce que nous nous rendons entièrement au film, y cédant, soulagé, comme à une tendre accolade." Luc Chessel, Les Inrockuptibles

Séances

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