Archives 2001-2011

LES MAUVAISES FRÉQUENTATIONS : DU CÔTÉ DE CHEZ ROBINSON


de Jean Eustache



PROGRAMMATION MAI 2008

France, 1963, 42 min
Avec Jean Eustache, Aristide, Daniel Bart, Dominique Jayr

Deux jeunes dragueurs désoeuvrés errent un dimanche à Paris. Ils rencontrent une jeune fille désireuse de danser. Le trio finit au Robinson, un dancing à Montmartre. Mais, vexés qu’elle se laisse toujours inviter par un autre, ils décident de se venger…
Ce film est la première partie du diptyque formé avec le moyen-métrage suivant et intitulé Les mauvaises fréquentations.
Tourné en décors naturels avec une caméra légère, ce premier film connu de Jean Eustache, interprétés par des comédiens amateurs, reflètent l’influence de la Nouvelle Vague, en particulier de Jean-Luc Godard. On pense à la série « Paris vu par » et en particulier à « Charlotte et son Jules » sur Jean Eustache : richesse de la bande son, présence de la ville et de la vie de quartier, humour…

« Pour les premiers courts-métrages que j’ai faits, j’avait dicté les plans et si je ne les avait pas écrits sur le papier, je les avait écrits dans la tête. »
Jean Eustache, Entretien réalisé par Sylvie Blum et Jérôme Prieur, paru dans Caméra/stylo, septembre 1983.

« Ethnologue de lui-même, Eustache, mine de rien, prend le pouls d’une époque. Derrière l’anecdote, il se fait le porte-parole d’une jeunesse en crise ; celle qui dépavera Paris Cinq ans plus tard. »
Marie-Elisabeth Rouchy,« La passion selon Jean », Télérama n°2516, 1er avril 1998, p.32

« Eustache renie le film très rapidement, comme il reniera peu à peu tous les suivants, comme s’il avait honte de ces personnages qu’il a lui-même un peu été à une époque. Chaque film semble aider Eustache à repousser un peu plus le passé derrière lui. »
Jean-Baptiste Morain, « Rétrospective Jean Eustache », Les Inrockuptibles n°168, le 1er avril 1998.

« Nous n’avons su qu’il tournait Les Mauvaises Fréquentations qu’au moment où nous nous sommes inquiétés de la disparition du coursier des Cahiers, engagé pour jouer l’un des deux rôles principaux. Une fois son film terminé, c’est d’abord à Rohmer et à moi qu’Eustache a voulu le montrer. Nous avons été surpris et très impressionnés. Bien qu’ayant un ton Nouvelle Vague, Les Mauvaises Fréquentations est un court-métrage totalement différent de ceux de Rozier, Truffaut, Godard, Rohmer, Rivette. Il y a là le ton Eustache qui implique, comme toujours chez lui, des personnages un peu losers, un peu paumés, proches du peuple, accoutumé à la pauvreté. Il les regarde sans naturalisme, mais fraternellement. »
Jean Douchet, « Le premier artiste d’après la Nouvelle Vague », Cahiers du cinéma « Spécial Jean Eustache » supplément au n°523, avril 1998, pp. 3-4

LES MAUVAISES FRÉQUENTATIONS : LE PÈRE NOËL A LES YEUX BLEUS

de Jean Eustache
France, 1966, 47 min
Avec Jean-Pierre Léaud, Gérard Zimmermann, Henri Martinez

Daniel a 20 ans et il est pauvre. Il se fait passer pour le fils déshérité d’un riche industriel. Le jeune homme aimerait s’acheter le duffle-coat de ses rêves pour être à la mode et séduire les filles. Pendant les fêtes de fin d’années, un emploi de Père Noël dans les rues de Narbonne va lui permettre de gagner de l’argent tout en séduisant les jeunes filles. Il reçoit chaque jour un billet de mille du photographe qui l’emploie.
Après avoir consacré ses deux premiers films à Paris, Eustache, à l’instar de Vigo ou de Pagnol, nous fait découvrir la province, cette région du sud-ouest dont il est originaire.

« Mes films fonctionnaient sur une émotion. Enfin je n’ai plus pensé au cinéma, j’entends au plan purement technique, à la caméra. On ne peut transmettre que de l’image et du son. Dans les courts-métrages, j’étais très embêté par le fait que je n’avais pas vu les plans, que je n’avais pas les moyens de les réaliser parce que je ne savais pas qu’ils seraient un peu plus difficile à filmer que ce que j’avais pensé. Par exemple dans Le Père Noël e les yeux bleus, un de mes premiers films, il y avait un plan où deux personnages passaient devant la caméra en parlant. Ils devaient arriver, ils disaient quelques mots, ils passaient devant la caméra de face et ils partaient dos à la caméra. On n’a pas pu faire comme je l’aurais voulu, il aurait fallu un travelling de deux ou trois mètres et que les personnages restent toujours à égale distance de la caméra. Ce plan je l’ai fait dans Mes Petites Amoureuses. Un personnage passe et il n’est pas plus près de la caméra ici que là, il a toujours une même présence. Je n’avais pas obtenu ça avec mon panoramique. (…) Ce plan je l’ai donc fait plus tard, mais il faut des moyens. »
Jean Eustache, Entretien réalisé par Sylvie Blum et Jérôme Prieur, paru dans Caméra/stylo, septembre 1983.

« Dès qu’il revient chez lui, à Narbonne, le cinéaste se fait plus grave. Le rythme du Père Noël a les yeux bleus est plus mesuré, plus contrôlé, en un mot plus écrit. L’idée du cadre s’affirme davantage. Le film commence et se termine comme un conte d’hiver (les plans de Narbonne, magnifique par leur densité, et saisis en noir et blanc par Philippe Théaudière, annoncent ceux que Nestor Almendros enregistrera trois ans plus tard, à Clermont-Ferrand, pour Ma nuit chez Maud de Rohmer.) Eustache se doit de saisir la province dans ses rites, ses permanences, sa routine mélancolique. »
Serge Toubiana, « Paris-Province », Cahiers du cinéma « Spécial Jean Eustache » supplément au n°523, avril 1998, p. 9.

« Je voulais tourner un film dans une ville que je connaissais, où j’avais vécu. Je ne suis pas tout à fait d’accord quand on dit : il faut voir une ville avec les yeux de celui qui y arrive pour la première fois. Au contraire, il faut la voir avec les yeux de quelqu’un qui sort tous les jours de chez lui, et l’imposer d’emblée au public. On trouve ça dans tous les films que j’aime. C’est un peu pour défendre et illustrer le cinéma que j’aimais, que j’ai pris ce parti. Il y a très peu de cinéastes qui sont nés à Paris, qui ont toujours vécu à Paris. Il serait bon que chacun aille faire des films dans son pays. »
Jean Eustache, propos recueilli par Serge Toubiana, Cahiers du cinéma n°284, janvier 1978

SEANCES

Mercredi 14 mai à 21h
Samedi 17 mai à 18h
Dimanche 18 mai à 21h