CYCLES ET RÉTROSPECTIVES

La Religieuse portugaise (en présence du réalisateur)


de Eugène Green



RÉTROSPECTIVE EUGÈNE GREEN • MARS 2016

A Religiosa Portuguesa
France-Portugal, 2004, 2h07, VOSTF
avec Leonor Baldaque, Ana Moreira, Adrien Michaux

Une jeune actrice franco-portugaise va tourner à Lisbonne un film s’inspirant d’un manuscrit attribué à une religieuse du XVIème siècle. Elle est seule dans la vie, peu satisfaite de ses expériences antérieures…. Film de rencontres qui donnent toutes l’impression de renvoyer à un ailleurs non dit et peut être indicible, où le cliché de « la ville personnage essentiel du film » s’avère vraiment, où la musique, encore une fois chez Green, prolonge l’action, y compris dans le dialogue musical du portugais et du français. Les mouvements de caméra larges sont pour la ville, les plans fixes, rapprochés, sont pour les visages et le passage d’un visage à l’autre crée des relais mystérieux. Un itinéraire intime éclot d’un récit qui prend le masque du hasard.

"Des visages tendrement radieux - comme éclairés de l'intérieur. Des acteurs qui fixent la caméra. Une langue soutenue, parsemée de mots courants rendus excentriques. Une musique qui transporte - le fado, chargé de saudade, cet état d'âme si complexe, sorte de nostalgie du futur. Dans tout cela, on reconnaît aisément la griffe de Green. Mais, à la différence de Toutes les nuits ou du Pont des Arts, La Religieuse portugaise joue davantage sur la contemplation et le recueillement. C'est que Julie, amoureuse passionnée, se cherche. Elle a connu beaucoup d'hommes, dans la joie et le chagrin. Elle souhaiterait autre chose. Une ardente patience l'anime. Le film est une quête sentimentale, spirituelle et... linguistique. Ce que Green met en scène tient, aussi, à la distinction entre langue maternelle et langue d'adoption, à cette sensation étrange que l'on éprouve parfois vis-à-vis d'une langue étrangère et pourtant familière, une langue qu'on a l'impression d'avoir parlée dans une vie antérieure. Ici, c'est le portugais - un voyage en soi. Muito obrigado." Jacques Morice, Télérama, novembre 2009

"lI faut d’évidence un cinéaste comme Eugène Green pour donner sens et beauté à une telle histoire. Green est un chasseur pacifique, un révélateur de fantômes (les absents qu’on ne voit pas mais qui sont là, ceux qu’on voit sans qu’ils soient là) au sens fort du mot. Il réalise ici son film le plus accompli, ses plus belles prises. Grâce à une maîtrise impressionnante de son art et des outils qu’il s’est fabriqués pour atteindre son but : une capture somptueuse, large (des panoramiques à 360 degrés sur les hauteurs de Lisbonne), des couleurs et des lumières (dues à son chef opérateur habituel, Raphaël O’Byrne), une captation précise et exhaustive des sons (due à son ingénieur du son Vasco Pimentel). L’image et le son sont portés à un tel degré de tension, d’intensité et d’attention que le présent de l’enregistrement cinématographique rend soudain compte de l’épiphanie de chaque instant.
Mais ces deux outils ne seraient rien sans les deux autres : d’abord les acteurs – qui incarnent leurs personnages au sens propre du terme –, filmés très souvent face caméra, comme s’ils s’adressaient à nous. Ensuite la parole, qui, dans la grande tradition chrétienne, est action, création chez Eugène Green. Comme dans tous ses films, les comédiens font ici les liaisons entre les mots, léger décalage avec la réalité de notre langue qui nous place dans un état de perception et d’écoute extraordinaire.
C’est à travers ce dispositif somme toute très technique, artisanal et prosaïque, ce tamis esthétique savamment mis au point au fil des films que Green tisse peu à peu le filet qui va lui permettre de nous révéler l’invisible, de nous convertir peu à peu à un état de sidération purement physique, comme dans la scène proprement hallucinatoire où la religieuse et la jeune actrice ne semblent soudain ne plus faire qu’une, se superposer l’une à l’autre dans l’image. Et de nous laisser, au final, dans un état d’émotion incomparable."
Jean-Baptiste Morain, Les Inrockuptibles, novembre 2009

Séances

jeudi 10/03 20:30 - - dimanche 13/03 13:30

• jeudi 10 mars • 20:30 • suivi d'une rencontre avec Eugène Green, réalisateur.

> Rétrospective Eugène Green proposée à l'occasion du festival Atlantide, Les Mots du Monde à Nantes-Festival des littératures du 10 au 13 mars 2016, organisé par le lieu unique et la Cité, le Centre des Congrès de Nantes. Plus d'informations sur www.atlantide-festival.org