CYCLES ET RÉTROSPECTIVES

Senso


de Luchino Visconti



ITALIE : CINÉMA POLITIQUE ET SOCIAL • MAI 2012

Italie, 1954, 1h55, VOSTF
avec Farley Granger, Alida Valli, Massimo Girotti, Rina Morelli

Adapté d’une nouvelle de Camillo Boito, Senso est la première confrontation de Visconti avec l’Histoire au cinéma. 1866 : les patriotes italiens, qui veulent libérer Venise de la domination autrichienne, manifestent au théâtre de la Fenice lors d’une représentation du Trouvère de Verdi. L’opéra interrompu, symbole et référence esthétique de la révolution garibaldienne, aura lieu hors les murs entre une comtesse italienne et un jeune officier autrichien. Pour vivre leur passion charnelle, Livia et Frantz trahiront, chacun, leur idéal patriotique dans la fuite, le reniement ou la désertion. Trompée, la comtesse dénoncera son amant. Représentants impuissants d’une classe sociale en train de disparaître, leur aventure se déroule dans le hors champ de l'Histoire, à laquelle leur veulerie les empêchent de participer.
Comme dans le Guépard, les Damnés ou Ludwig, le choix de Visconti, de placer ses "héros" sur les points de rupture de l’Histoire, au moment où un ordre meurt en enfantant son successeur, structure le film qui culmine, comme souvent chez Visconti, dans de grandes scènes décrivant un monde en décomposition. Toute l’Italie militante comprit, lors de la sortie du film, notamment à la Mostra de Venise, que le film signifiait une préfiguration des trahisons de la période post-fasciste, d’où la forte polémique qu’il suscita.
"Toute Histoire est anachronique, l’Histoire est toujours au présent" expliquait Visconti paraphrasant Gramsci.


"Après l'austérité déchirante de ses trois premiers films néoréalistes en noir et blanc
(Ossessione, La terre tremble, Bellissima), Visconti passe à la sensualité et au Technicolor en 1954 pour un pur mélodrame de la passion sur fond de révolution garibaldienne. Trahison politique et esthétique que lui fit payer le public de l'époque. Ce qui le poussera à revenir un temps au noir et blanc et à des sujets plus prolétaires pour ses deux films suivants, Nuits blanches et Rocco et ses frères. Senso apparaît pourtant aujourd'hui comme une parfaite œuvre de transition entre ses drames de la misère sous influence communiste des années 40 et ses somptueuses tragédies historiques des années 60 et 70. "
Jérémie Couston, Télérama

Séances

Samedi 12 mai 2012 à 16:30
Dimanche 13 mai 2012 à 21:00
Mercredi 16 mai 2012 à 21:15