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Archives 2001-2011

U


de Grégoire Solotareff et Serge Elissalde



PROGRAMMATION AVRIL 2008

France, 2006, 1h15, animation
Avec les voix de Vahina Giocante, Isild le Besco, Marie-Christine Orry, Bernadette Lafont, Artus de Penguern, Sanseverino

Mona est une princesse dont aucune petite fille n'envierait le sort. Depuis la disparition de ses parents, elle vit seule dans un château avec deux personnages sinistres et repoussants, Goomi et Monseigneur. Un jour, le son de ses pleurs fait apparaître une licorne, qui s'appelle U, et qui dit être là pour la réconforter et la protéger tant qu'elle en aura besoin.
U devient donc la compagne de Mona, sa petite et sa grande sœur à la fois, sa confidente et son inséparable amie. Et la vie est plus douce. Mona grandit et se transforme en une jolie princesse, alors que s'installe dans la forêt voisine une troupe de Wéwés, des êtres pacifiques, pleins de charme et de fantaisie. Ils n'ont aucun pouvoir particulier, et pourtant leur présence va tout changer.

« Il y a plusieurs raisons d’aimer U, le film de Grégoire Solotareff (auteur et dessinateur de livres pour enfants) et Serge Elissalde (réalisateur), qui avaient tous deux participé au beau programme de courts métrages Loulou et autres loups, salué ici-même à sa sortie en 2003. La première raison est un peu bête. C’est ce titre : U. On ne peut pas faire plus court, plus intrigant, plus sibyllin. U, dans le film, est une petite et mignonne licorne. Elle s’appelle U parce qu’elle apparaît dans la vie de la jeune princesse Mona, un jour où celle-ci pleure, en faisant
“Uuuuuu…" Dans la tradition des contes, les licornes protègent la virginité des jeunes filles. Dans le film, U va aussi devenir la meilleure amie de Mona, dont les parents sont morts et qui est “élevée" par d’affreux rats. Mais un jour, un beau chanteur itinérant, avec ses joyeux compagnons' passe par là, et Mona va s’enticher de lui, faire ses premiers pas en amour (la scène de la découverte du baiser est l’une des plus belles du film). Amour qui va bien sûr prendre le pas sur la belle amitié. Que va devenir U ? La deuxième raison, c’est la forme qu’emprunte le récit du film : réduit au minimum, il ne regorge pas de péripéties, il est pépère, sans coups de théâtre ni rebondissements. Les personnages trouvent toujours le temps de chanter une petite chanson, de faire une petite ronde. On ne cherche pas à nous monopoliser
du temps de cerveau. La troisième, c’est que U correspond tout à fait à l’idée que nous nous faisons d’un film pour enfants, et que nous avions déjà exposée lors de la sortie du dernier épisode de Kirikou : contrairement à tous ces parfois trépidants films en images de synthèse qui sortent désormais chaque mois, le scénario n’a pas été dosé savamment et sociologiquement dans l’idée de
séduire toutes les générations présentes dans la salle. Donc, pas de scènes destinées aux enfants et d’autres destinées aux parents, pas de gags pour les enfants et de private jokes pour les adultes (tout juste un petit pastiche,
charmant, du Mépris). D’ailleurs, au fond, il n’est pas sûr du tout que le film soit destiné aux enfants. On ne sait pas
très bien et cette incertitude est tout à fait agréable : voici un film pour tout le monde. Quatrièmement – parlons de la forme –, Solotareff et Elissalde ont un don pour les dialogues : des dialogues qui ne ressemblent pas à ce qu’on entend aujourd’hui au cinéma, qu’on soit dans le cinéma d’animation ou dans le cinéma traditionnel. Il y a ces phrases qui commencent et ne se terminent pas, il y a ces petits mots qui traînent en bout de phrases, et qui en disent parfois beaucoup plus que les mots auxquels on réfléchit avant de les prononcer. Et puis il faudrait parler des décors, peints à la gouache, qui rappellent Gauguin, et qui sont très beaux. Et enfin il y a les voix. Il est de mode depuis plusieurs années de faire doubler les personnages par des “célébritésî (de Bruce Willis à
Jamel Debbouze en passant par Diam’s ou le perroquet pétomane Laurent Gerra…). A tel point qu’on en viendrait presque à regretter le temps pas du tout béni des dieux où tous les dessins animés étaient doublés par Roger
Carel, Francis Lax, Jacques Balutin, Michel Roux et Micheline Dax. Mais avec U, tout est différent. Parce qu’on a vraiment l’impression que les personnages ont été adaptés aux voix, ou plutôt que les dessins ont tenu compte de la personnalité, du physique des acteurs qui
leur prêtent leur voix. Une sorte d’alchimie mystérieuse a lieu entre les doubleurs et les créatures dessinées. Le résultat, c’est qu’on voit presque Isild Le Besco derrière
cette petite princesse au si long nez qui prend des poses (même si la jolie Isild n’a évidemment pas ce grand nez, même si l’on entend bien qu’il y a aussi un peu de Brigitte Bardot dans cette voix). U aussi, avec ses cornes, a quelque chose de la grande et belle Vahina Giocante avec sa voix un peu éraillée, rassurante et triste. Enfin, si U est la bonne nouvelle de la semaine, c’est aussi parce qu’il n’a aucune morale à nous vendre, aucune leçon de conduite à conseiller. U, c’est juste un constat, on peut le
trouver triste ou gai, on peut s’en désoler ou s’en réjouir, c’est celui qui fait que lorsque nous grandissons, nous laissons toujours quelque chose, quelqu’un derrière nous, et que c’est comme ça, que c’est normal, qu’il n’y a
pas à tortiller et à s’en faire des noeuds. Rien de neuf ? Peut-être. »
Jean-Baptiste Morain, Les Inrockuptibles

GRÉGOIRE SOLOTAREFF
Grégoire Solotareff est auteur, scénariste et graphiste. Il est né en 1953 en Egypte. Après des études de médecine, il a décidé de se consacrer entièrement au dessin et à l'écriture. Grégoire Solotareff a écrit de nombreux livres (128 en 15 ans) dont Le Dictionnaire du Père Noël, Mathieu, Moi, Fifi, Un jour un loup, Le Diable des Rochers, Toi grand et moi petit, Un chat est un chat. Il est aussi l'auteur des cinq histoires de Loulou et autres loups, film réalisé en 2003 par Serge Elissalde.

SERGE ELISSALDE
Serge Elissalde est réalisateur de film d'animation. Il est né en 1962 à Besançon. Il enseigne d'abord le dessin puis se lance dans l'animation et réalise plusieurs court-métrages dont Le Balayeur, Emile Frout, Raoul et Jocelyne. Il réalise ensuite Verte et Merlin pour la télévision avant de travailler sur le film Loulou et autres loups avec Grégoire Solotareff

SEANCES

Mercredi 16 avril à 15h
Vendredi 18 avril à 15h
Dimanche 27 avril à 14h30