CARTE BLANCHE CATHERINE CAVELIER • OCTOBRE 2014
USA, 1954, 1h48, VOSTF
avec Cyd Charisse, Gene Kelly, Van Johnson
avec Cyd Charisse, Gene Kelly, Van Johnson
En quelques scènes dans un insupportable New York, Minnelli réussit à nous prouver que la vraie vie est ailleurs, dans le rêve éveillé d'un autre monde où l'émotion passe par la musique, la danse, la couleur, un monde où l'artificiel du studio participe du décalage, du pas de côté par rapport à la trivialité du réel, un monde où les êtres ont la légèreté d'un Gene Kelly bondissant, accompagné par la grâce déterminée d'une Cyd Charisse en gloire. Et l'humour en plus.
Séances
Lundi 13/10 18:15
Dimanche 19/10 18:00
--
On peut raisonnablement dire que l’histoire et ses thèmes sont à l’origine du plus "minnellien" des films du cinéaste, jouant constamment sur son sujet de prédilection : les rapports entre rêve et réalité. A l’intérieur même de ce monde de rêve, le cinéaste oppose le romantisme rêveur du couple Kelly/Charisse à la trivialité terre à terre des rapports qui s’établissent entre le personnage de Van Johnson et une villageoise. Tommy est un doux rêveur désespérant de découvrir un jour le Grand Amour (« Parfois je me sens incapable d’aimer »), Fiona croit au Prince Charmant et ne se donnera qu’à sa venue ; à l’inverse, Jeff est un sceptique indécrottable qui ne veut croire qu’à ce qu’il voit (et encore) et la villageoise qui l’entreprend (lors d’une scène assez drôle) semble proche de la nymphomanie. Et pourtant, paradoxalement, c’est Jeff, qui sans le vouloir, fera que le village ne s’évanouira pas dans les abîmes en SPOILER tuant accidentellement l’homme qui voulait forcer les frontières du village FIN DU SPOILER. Si, pour certains personnages, Brigadoon représente le Shangri-La (le paradis selon James Hilton dans son roman adapté par Capra, Lost Horizon), pour d’autres, il n’est qu’une étroite prison : Harry Beaton, l’amoureux éconduit, ne songe qu’à fuir pour voir d’autres horizons et découvrir d’autres lieux, gens et coutumes. Lorsque nos deux Américains, n’ayant pas voulu croire assez fort à ce qu’ils viennent de voir et de vivre, retournent à New York, Minnelli retrouve le brillant qui le caractérise pour décrire des microcosmes urbains : la faune new-yorkaise (faux intellos, femmes névrosées, hommes désœuvrés... ) est décrite ici avec une acuité et une tendre ironie qui n’appartiennent qu’à lui. L’idée des simples mots prononcés lors d’une discussion faisant se déconnecter Tommy de la triviale réalité pour retourner en pensée au pays de sa bien-aimée est magnifique.
Cette virtuose parenthèse citadine terminée, le cinéaste nous fait revenir dans cette Ecosse de studio où un nouveau miracle va avoir lieu « Car quand on aime vraiment, tout est possible ! ». Après que Tommy ait découvert que l'on se rend compte de la valeur des choses une fois qu’on les a perdues, la brume se déchire à nouveau et fait place au « Triomphe de la pensée romantique » selon Dominique Rabourdin (in Minnelli, de Broadway à Hollywood - Hatier). Le spectateur quitte le film le cœur léger. Ceux qui ne supportent pas les Happy End peuvent prendre rendez-vous ailleurs ! Peut être moins achevée techniquement et plastiquement, moins moderne et ambitieuse que d’autres oeuvres de Minnelli, Brigadoon n’en demeure pas moins un film superbe, attachant et éminemment personnel. Gene Kelly, moins exubérant qu’à l’habitude, Van Johnson absolument parfait dans un rôle un peu ingrat, Cyd Charisse légère et somptueusement belle sont là pour nous faire participer à ce petit miracle cinématographique. Il ne vous reste plus qu’à faire de beaux rêves !
Erik Maurel - DVD Classik . février 2005
Dimanche 19/10 18:00
--
On peut raisonnablement dire que l’histoire et ses thèmes sont à l’origine du plus "minnellien" des films du cinéaste, jouant constamment sur son sujet de prédilection : les rapports entre rêve et réalité. A l’intérieur même de ce monde de rêve, le cinéaste oppose le romantisme rêveur du couple Kelly/Charisse à la trivialité terre à terre des rapports qui s’établissent entre le personnage de Van Johnson et une villageoise. Tommy est un doux rêveur désespérant de découvrir un jour le Grand Amour (« Parfois je me sens incapable d’aimer »), Fiona croit au Prince Charmant et ne se donnera qu’à sa venue ; à l’inverse, Jeff est un sceptique indécrottable qui ne veut croire qu’à ce qu’il voit (et encore) et la villageoise qui l’entreprend (lors d’une scène assez drôle) semble proche de la nymphomanie. Et pourtant, paradoxalement, c’est Jeff, qui sans le vouloir, fera que le village ne s’évanouira pas dans les abîmes en SPOILER tuant accidentellement l’homme qui voulait forcer les frontières du village FIN DU SPOILER. Si, pour certains personnages, Brigadoon représente le Shangri-La (le paradis selon James Hilton dans son roman adapté par Capra, Lost Horizon), pour d’autres, il n’est qu’une étroite prison : Harry Beaton, l’amoureux éconduit, ne songe qu’à fuir pour voir d’autres horizons et découvrir d’autres lieux, gens et coutumes. Lorsque nos deux Américains, n’ayant pas voulu croire assez fort à ce qu’ils viennent de voir et de vivre, retournent à New York, Minnelli retrouve le brillant qui le caractérise pour décrire des microcosmes urbains : la faune new-yorkaise (faux intellos, femmes névrosées, hommes désœuvrés... ) est décrite ici avec une acuité et une tendre ironie qui n’appartiennent qu’à lui. L’idée des simples mots prononcés lors d’une discussion faisant se déconnecter Tommy de la triviale réalité pour retourner en pensée au pays de sa bien-aimée est magnifique.
Cette virtuose parenthèse citadine terminée, le cinéaste nous fait revenir dans cette Ecosse de studio où un nouveau miracle va avoir lieu « Car quand on aime vraiment, tout est possible ! ». Après que Tommy ait découvert que l'on se rend compte de la valeur des choses une fois qu’on les a perdues, la brume se déchire à nouveau et fait place au « Triomphe de la pensée romantique » selon Dominique Rabourdin (in Minnelli, de Broadway à Hollywood - Hatier). Le spectateur quitte le film le cœur léger. Ceux qui ne supportent pas les Happy End peuvent prendre rendez-vous ailleurs ! Peut être moins achevée techniquement et plastiquement, moins moderne et ambitieuse que d’autres oeuvres de Minnelli, Brigadoon n’en demeure pas moins un film superbe, attachant et éminemment personnel. Gene Kelly, moins exubérant qu’à l’habitude, Van Johnson absolument parfait dans un rôle un peu ingrat, Cyd Charisse légère et somptueusement belle sont là pour nous faire participer à ce petit miracle cinématographique. Il ne vous reste plus qu’à faire de beaux rêves !
Erik Maurel - DVD Classik . février 2005