CINÉMA D'HIER ET D'AUJOURD'HUI • OCTOBRE - NOVEMBRE 2012
USA, 1981, 2h02, VOSTF, interdit -12 ans
avec James Caan, Tuesday Weld, Willie Nelson
RÉÉDITION
avec James Caan, Tuesday Weld, Willie Nelson
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Après onze ans de prison, Frank, cambrioleur professionnel, rêve d'une vie normale. Pour cela il doit faire un dernier coup. Mais entre la mafia de Chicago et la police corrompue, son travail risque d'être plus difficile que prévu. Ce premier film de Michael Mann s'inscrit dans une pure tradition du film noir et renferme déjà toute la touche du réalisateur : héros marginal, ville personnifiée et magnifiée par des ambiances nocturnes, accumulation de situations dramatiques donnant toute l'intensité à une intrigue qui ne laisse apparaître aucune issue rédemptrice.
"Nous sommes aujourd'hui très exactement à la mauvaise distance des années 1980. Quand on revoit un film américain de cette décennie tout irrite - la caisse claire de la batterie sur la bande son, les permanentes féminines et masculines, la sophistication brutale des éclairages. A moins de voir (ou revoir) Le Solitaire, le premier long métrage que Michael Mann a réalisé pour le cinéma, présenté en compétition au Festival de Cannes en 1981. Le metteur en scène (qui n'était pas tout à fait un débutant, il avait déjà beaucoup travaillé pour la télévision) s'empare d'une figure classique du film noir - le truand rebelle qui s'oppose au milieu organisé - pour le placer au centre d'une tragédie impeccablement dessinée par le mouvement, la lumière et la musique. Frank (James Caan) a passé sa jeunesse en prison. Pendant la journée, il vend des voitures et gère un bar. La nuit, il vole des diamants. Mais il faut croire que la solitude lui pèse puisque simultanément il demande une femme en mariage et accepte de travailler pour un commanditaire, Leo (Robert Prosky). Le mariage suppose un dernier casse avant de fonder une famille, la commandite la répétition de coups rentables jusqu'à la retraite. Cette contradiction est insoluble et Frank devra payer le prix de cette incohérence.
Il faudrait détailler chaque séquence du Solitaire pour mettre en valeur la singularité et la beauté que Michael Mann confère à ces situations classiques. La demande en mariage de Frank à Jessie (Tuesday Weld) est l'une des plus belles scènes d'amour que l'on puisse imaginer. Les deux comédiens - James Caan, brutal et fragile, Tuesday Weld méfiante et prête à céder - sont au sommet de leur art. Au lieu de les laisser dans un lieu unique, Mann les fait passer d'une voiture à un bar désert, accroissant la tension, mettant à nu le désir farouche de rompre la solitude. Peu de metteurs en scène sont en mesure de traiter avec la même réussite une séquence amoureuse et un casse. Michael Mann en est capable, qui a engagé des cambrioleurs comme conseillers techniques. Cette alliance d'une précision documentaire et d'une stylisation dynamique donne au Solitaire une énergie foudroyante.
Dès ce premier film, le réalisateur met la nuit au service de sa mise en scène : les lumières, les distances, la différence entre l'intérieur et l'extérieur sont déformées, abolies ou renversées. Dans ce monde sans repères, Frank n'a que deux appuis, Okla, qui fut son mentor en prison, et Jessie. Dans le rôle du vieux taulard, qui finit ses jours derrière les barreaux, Willie Nelson est étonnant, respirant à la foi la dureté et la bonté. Le chanteur de country a ici l'occasion de faire plus qu'une apparition et en profite à bon escient. Quant à Tuesday Weld, qui commença sa carrière dans les séries B pour teenagers des années 1950, elle est ici magnifique. Enfin, si Le Solitaire se détache aussi nettement de la production de ces années-là, c'est aussi par la musique de Tangerine Dream. Le groupe allemand, alors encore inconnu aux États-Unis, a composé une partition au synthétiseur qui fait gronder les menaces du destin, tout en évitant les clichés jazz ou rock en usage à l'époque."
Thomas Sotinel, Le Monde
"Nous sommes aujourd'hui très exactement à la mauvaise distance des années 1980. Quand on revoit un film américain de cette décennie tout irrite - la caisse claire de la batterie sur la bande son, les permanentes féminines et masculines, la sophistication brutale des éclairages. A moins de voir (ou revoir) Le Solitaire, le premier long métrage que Michael Mann a réalisé pour le cinéma, présenté en compétition au Festival de Cannes en 1981. Le metteur en scène (qui n'était pas tout à fait un débutant, il avait déjà beaucoup travaillé pour la télévision) s'empare d'une figure classique du film noir - le truand rebelle qui s'oppose au milieu organisé - pour le placer au centre d'une tragédie impeccablement dessinée par le mouvement, la lumière et la musique. Frank (James Caan) a passé sa jeunesse en prison. Pendant la journée, il vend des voitures et gère un bar. La nuit, il vole des diamants. Mais il faut croire que la solitude lui pèse puisque simultanément il demande une femme en mariage et accepte de travailler pour un commanditaire, Leo (Robert Prosky). Le mariage suppose un dernier casse avant de fonder une famille, la commandite la répétition de coups rentables jusqu'à la retraite. Cette contradiction est insoluble et Frank devra payer le prix de cette incohérence.
Il faudrait détailler chaque séquence du Solitaire pour mettre en valeur la singularité et la beauté que Michael Mann confère à ces situations classiques. La demande en mariage de Frank à Jessie (Tuesday Weld) est l'une des plus belles scènes d'amour que l'on puisse imaginer. Les deux comédiens - James Caan, brutal et fragile, Tuesday Weld méfiante et prête à céder - sont au sommet de leur art. Au lieu de les laisser dans un lieu unique, Mann les fait passer d'une voiture à un bar désert, accroissant la tension, mettant à nu le désir farouche de rompre la solitude. Peu de metteurs en scène sont en mesure de traiter avec la même réussite une séquence amoureuse et un casse. Michael Mann en est capable, qui a engagé des cambrioleurs comme conseillers techniques. Cette alliance d'une précision documentaire et d'une stylisation dynamique donne au Solitaire une énergie foudroyante.
Dès ce premier film, le réalisateur met la nuit au service de sa mise en scène : les lumières, les distances, la différence entre l'intérieur et l'extérieur sont déformées, abolies ou renversées. Dans ce monde sans repères, Frank n'a que deux appuis, Okla, qui fut son mentor en prison, et Jessie. Dans le rôle du vieux taulard, qui finit ses jours derrière les barreaux, Willie Nelson est étonnant, respirant à la foi la dureté et la bonté. Le chanteur de country a ici l'occasion de faire plus qu'une apparition et en profite à bon escient. Quant à Tuesday Weld, qui commença sa carrière dans les séries B pour teenagers des années 1950, elle est ici magnifique. Enfin, si Le Solitaire se détache aussi nettement de la production de ces années-là, c'est aussi par la musique de Tangerine Dream. Le groupe allemand, alors encore inconnu aux États-Unis, a composé une partition au synthétiseur qui fait gronder les menaces du destin, tout en évitant les clichés jazz ou rock en usage à l'époque."
Thomas Sotinel, Le Monde
Séances
Vendredi 26 octobre 2012 à 18:30
Samedi 27 octobre 2012 à 21:00
Mardi 30 octobre 2012 à 20:30
Dimanche 4 novembre 2012 à 14:15
Mardi 6 novembre 2012 à 18:30
• Mardi 30 octobre • 20:30 • leçon de cinéma par Jérôme Baron, président du Cinématographe et directeur artistique du Festival des 3 Continents
Samedi 27 octobre 2012 à 21:00
Mardi 30 octobre 2012 à 20:30
Dimanche 4 novembre 2012 à 14:15
Mardi 6 novembre 2012 à 18:30
• Mardi 30 octobre • 20:30 • leçon de cinéma par Jérôme Baron, président du Cinématographe et directeur artistique du Festival des 3 Continents