Le Cinematographe
Le Cinématographe
Le Cinématographe, salle de cinéma à Nantes et Education à l'image

Archives 2001-2011

VIVRE ME TUE


de Jean-Pierre Sinapi



PROGRAMMATION AVRIL 2004

France, 2002, 1h26
avec Sami Bouajila, Jalil Lespert, Sylvie testud, Simon Bakinde

VIVRE ME TUE
Paul Smaïl, 27 ans, français dont le physique dévoile les origines arabes, boxe, enrage, bouquine. Fou d’amour pour Myriam, fou de tendresse pour Daniel, le “petit frère” mal dans sa peau. En attendant, il livre des pizzas. Mais en attendant quoi ?

Autour de la fraternité et du manque de confiance en soi, Jean-Pierre Sinapi a écrit, avec " Vivre me tue ", une œuvre forte et touchante portée par trois admirables comédiens.

Construit comme un grand flash-back, Vivre me tue va, par petites touches, par une succession de fragments, par des bouts de vie, raconter l’histoire de deux garçons qui ont, a priori, assez d’atouts pour réussir dans la vie. Marocains d’origine mais nés à Paris, Paul et Daniel Smaïl ont une bonne tête, une famille aimante et surtout ils se soutiennent dans une magnifique fraternité… Titulaire d’un DEA de littérature sur Moby Dick, Paul, malgré ses études, est au chômage depuis des mois. Pour survivre, il travaille comme livreur de pizza et il se désespère de constater que ses entretiens d’embauche tournent court simplement parce qu’il se nomme Smaïl…

Sans céder au didactisme, pas plus qu’à un romantisme confortable sur le racisme ordinaire en France, Sinapi, avec humour, tendresse et empathie, raconte deux personnages qui pensent impossible de s’intégrer sans se déformer, intellectuellement pour l’un, physiquement pour l’autre. Paul, le séduisant intello obsédé par l’échec, a aussi besoin de boxer " pour se purger le sang " de ses frustrations tandis que Daniel, absorbé par un narcissisme outrancier, fabrique, en se dopant à mort, un corps qui ne fait, en définitive, rêver que les mateurs des sex-shops de Pigalle ou d’Hambourg…

Pour réussir le portrait de ses " malades de la vie ", Jean-Pierre Sinapi a bénéficié de trois comédiens exceptionnels : Sami Bouajila (Paul) cache sous son sourire une fêlure profonde d’écorché vif que, seule, sans doute, l’écriture viendra soulager. Tour à tour lumineuse et grave, Sylvie Testud campe Myriam, l’étudiante aimée de Paul qui prépare l’agrégation de lettres tout en étant une supportrice acharnée du RC Lens. Enfin, Jalil Lespert (révélé par Ressources humaines) est un extraordinaire Daniel, grand enfant retardé, naïf et puceau, terriblement pathétique dans sa quête d’un corps parfait.
" Vivre me tue " (les trois premiers mots du roman – alors – inachevé de Paul Smaïl) est une œuvre forte parce qu’elle se tient toujours à juste distance de ses personnages. Observateur attentif et humaniste, Jean-Pierre Sinapi n’a que faire de démonstration. Son film touche profondément parce que Paul, Myriam et Daniel sont simplement vivants. Et que leur fureur de vivre est bouleversante.
Pierre-Louis Cereja

SEANCE

Mercredi 21 avril à 20h30